Selon une enquête exclusive et particulièrement bien renseignée de L’Argus, la Sécurité routière a lancé « un triple appel d’offres » visant à moderniser totalement son arsenal d’appareils de contrôles automatisés. L’idée est de faire entrer l’intelligence artificielle dans les nouveaux radars, afin de ne plus rien laisser passer. Sidérant !
Vous n’avez encore rien vu… Voici le message qui transparait du long article exclusif que L’Argus a publié en ligne ce jeudi 4 septembre. Consacré au « plan secret de la sécurité routière », ce programme « radars 2026-2030 » égraine par le menu toutes les idées que les caciques du ministère de l’Intérieur aimeraient mettre en place pour traquer davantage les automobilistes coupables d’infractions. Ainsi, le « triple appel d’offres », comme l’indique L’Argus, « concerne tous les travaux visant à étudier et définir de nouveaux dispositifs (radars, systèmes associés), les faire évoluer, concevoir des expérimentations, les suivre et étudier toute technologie innovante permettant d’améliorer ou d’optimiser les dispositifs ». Et que l’on se rassure : « Les nouvelles fonctionnalités des radars s’orienteront inéluctablement vers les preuves vidéo filmant la voie publique ainsi que la collecte des données techniques, parfois à caractère personnel », explique l’enquête. La Cnil saura apprécier, assurément !
Scruter la vie des gens
Car le nouveau mantra de la Sécurité routière semble le suivant : plus d’intrusion dans la vie des gens pour toujours plus d’efficacité. Les pouvoirs publics demanderaient même aux candidats de cet appel d’offres multiple des notes techniques et réglementaires afin de faire fonctionner à pleine capacité leurs nouveaux joujoux. Plus clairement, la Sécurité routière ne veut pas que des radars, elle souhaite aussi se voir fournir les études juridiques qui vont avec, afin de désamorcer en amont toute velléité de contestation.
L’article de L’Argus détaille ensuite les évolutions prévues des radars qui existent déjà ou de leurs successeurs. Les radars de vitesse moyenne, au nombre de 69 à ce jour, auront finalement une descendance : « Il est prévu d’acquérir une nouvelle génération d’équipements, capables de réaliser des contrôles sur plusieurs tronçons successifs ». De nouvelles fonctionnalités devraient apparaitre sur ces équipements. De la même manière, les radars tourelles vont se multiplier (+200 de prévus), le but étant d’atteindre un parc de 1 700 cabines suspendues à un mât d’ici à 2028.
Les radars urbains, ces équipements encore relativement récents, pourraient demain être en capacité de contrôler le téléphone au volant ou encore le non-respect d’un couloir de bus. La Sécurité routière réclame aux candidats « une analyse technico-juridique » afin de parvenir à sanctionner efficacement le téléphone tenu en main au volant. Les pouvoirs publics miseront en outre sur 500 voitures « hiboux », c’est-à-dire munies d’un radar embarqué, tandis que les radars autonomes vont passer de 450 à 500 exemplaires au bord des routes « à courte échéance ».
Chères voitures radars…
Comme nous l’écrivions déjà fin 2023 dans l’étude que nous leur avions dédiée, les perfides voitures-radars privatisées – elles sont indétectables dans la circulation, rappelons-le – couvriront très prochainement 86 départements de la métropole, contre environ 55 à ce jour. Amis corses, vous pensiez peut-être y échapper. Détrompez-vous : de tels véhicules pourraient circuler sur vos routes dès 2026. La situation des départements d’Île-de-France n’est pas très claire, si ce n’est que les voitures-radars devraient y être conduites par les forces de l’ordre et non par des chauffeurs embauchés par des sociétés privées. Toute la question est de savoir combien de voitures roulent effectivement… L’enquête de L’Arguspointe le fait que seules 237 tablettes sont en service, sachant que celles-ci sont des « éléments stratégiques montés à bord ». Il est donc assez facile de déduire que, pour l’instant, ne roulent pas plus de 237 voitures-radars en France métropolitaine (sur les 450 prévues).
Depuis la fin de la Covid, la France a littéralement perdu la tête avec le système de contrôle sanction automatisé. L’exécutif avait promis de ne pas dépasser 4 500 radars au bord des routes, la nation en comptait 4 753 au 31 décembre dernier, selon la Cour des comptes. Le montant des amendes récoltées dans le cadre des PV routiers tutoie désormais les deux milliards d’euros : 1,964 milliard d’euros en 2024, contre 1,931 milliard en 2023. Entre les innovations à venir et la vague annoncée de radars implantés par les collectivités territoriales, les deux milliards d’amendes annuelles devraient être pulvérisés très prochainement, alors même que les résultats de la sécurité routière stagnent depuis bien longtemps.
Les candidats doivent soumettre leurs dossiers avant le 24 octobre 2025.

