Sécurité à bord des véhicules : « On est arrivé quasiment à un optimum aujourd’hui »

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Lors du colloque que la LDC a organisé à l’Assemblée nationale en mars 2024, Jean-Yves Le Coz, expert en biomécanique et ancien directeur du laboratoire d’accidentologie de PSA/Renault, a retracé l’histoire de la sécurité à bord des véhicules… et des multiples avancées technologiques qui se sont révélées fondamentales pour abaisser l’accidentologie.

Pouvez-vous nous parler de l’évolution des voitures ces dernières décennies ? 

Le premier congrès mondial dédié aux technologies pour la sécurité routière a eu lieu en 1924, à Washington, D.C. Quarante ans plus tard, il y a eu un livre très important publié aux États-Unis par Ralph Nader. Ce livre, « Dangereuse quelle que soit la vitesse » (« Unsafe at any speed ») a été le déclencheur sur la sécurité automobile moderne. C’est à partir de ce livre-là, dans les années 1960, qu’on a vu le « Traffic Safety Act » aux États-Unis, qu’on a vu les premières réglementations de sécurité automobile apparaître et qu’en France, on a vu apparaître l’installation obligatoire des ceintures de sécurité trois points.

Pouvez-vous nous en dire plus sur la ceinture de sécurité ?

Dans les années 1960, surtout 1970 et début des années 1980, vous avez eu une évolution très importante sur les structures des voitures. La ceinture de sécurité y est considérée comme fondamentale. Or, il faut savoir que, encore aujourd’hui, dans environ 30 % des accidents mortels, la ceinture de sécurité n’était pas portée.

Autour de cette ceinture de sécurité, on a mis quantité d’éléments. Notamment, un « enrouleur-bloqueur » : vous savez, il s’agit de ce système qui vous empêche de vous ceinturer quand vous êtes un peu énervé lorsque vous entrez dans votre voiture. Vous tirez dessus et ça se bloque. Mais c’est ce qui fait que la ceinture de sécurité reste collée à votre thorax et votre abdomen, si jamais vous êtes impliqué dans un accident. On a inventé aussi les systèmes pyrotechniques, ce qu’on appelle les « prétensionneurs ». Certains constructeurs en installent même deux par siège. Ce qu’on a remarqué, c’est que lorsque l’on faisait tout ça, on augmentait quand même les efforts dans la ceinture de sécurité. Ces efforts peuvent dépasser une tonne au niveau de la cage thoracique. Or, avec l’âge, la structure osseuse devient moins résistante… le risque, c’était donc de provoquer des volets costaux. Donc on a commencé à mettre des limiteurs d’effort dans la ceinture de sécurité, pour pouvoir justement diminuer les efforts dans la cage thoracique. C’est ce que l’on appelle la sécurité passive.

Qu’entendez-vous par sécurité passive ?

Ce qu’il faut comprendre, quand on parle de sécurité passive, c’est que nous n’avons pas « des » systèmes de sécurité. Il s’agit plutôt d’un seul système de sécurité, qui contient tous ces éléments. Parce que tout ça, ça doit fonctionner en combien de temps ? Entre 10 et 35 millièmes de seconde. Entre 10 et 35 millièmes de seconde, le système technique doit décider si vous êtes ou pas impliqué dans un accident grave et s’il doit se déclencher à ce moment-là.

Que faut-il faire pour éviter les accidents ?

On a mis en place l’ABS, des systèmes d’antiblocage des roues, l’aide au freinage d’urgence et j’en passe. Certains constructeurs ont même recours à quatre roues directrices… Ce sont des éléments de sécurité routière… à condition qu’on n’en profite pas pour passer plus vite dans les virages. Lorsque l’on fait des comparaisons entre les véhicules équipés de tous les systèmes que je vous ai présentés là, par rapport à ceux qui ne les ont pas, on obtient moins 70 % de risques de blessures graves et mortelles.

Est-ce que l’on peut encore espérer des progrès en matière de sécurité active et passive ?

J’ai envie de dire, sur un plan de coût-efficacité, que l’on est arrivé quasiment à un optimum aujourd’hui quand on fonctionne avec le cahier des charges qu’ont les constructeurs automobiles, lequel s’appelle le Code de la route. Il va y avoir d’autres évolutions, mais ça ne va pas être rapide, ça va vraiment prendre beaucoup de temps et puis ça va être difficile. Quelque part, cela consistera à supprimer les conducteurs, et à rendre les voitures autonomes.

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